Terrasses ou notre long baiser si longtemps retardé, de Laurent Gaudé

13 novembre 2015…

Avec Terrasses ou notre long baiser si longtemps retardé, un sublime récit polyphonique, Laurent Gaudé m’a fait endosser plusieurs rôles. Entrer successivement dans la peau de divers personnages et dans une réalité apocalyptique. Par le prisme des blessés, des policiers, des pompiers, des badauds, des voisins, de la famille, des amis… Et des morts.  

L’écrivain m’a prise par la main pour me faire tangiblement vivre de l’intérieur tant ce qui s’est produit sur ces terrasses que dans cette salle du Bataclan. J’y étais assise. J’ai bu un verre. En bonne compagnie. J’y ai écouté ce concert des Eagles of Death Metal.

J’étais successivement cette amoureuse. Cette sœur. Cette mère. Cette femme… Toutes et tous. Moi. Celle qui aimait et a vécu l’horreur absolue en même temps. J’ai vu la mort danser autour de moi, me frôler, me toucher à grands coups de hasard. Moi ? Pas moi ?

J’ai souffert. Pleuré. Combattu. Vécu. Je suis morte. En réalité comme entre les lignes. 

Laurent Gaudé a trouvé les mots justes, sobres, percutants pour narrer l’indicible. Il a glissé dans l’innommable, poésie et subtilité. Une musicalité empreinte de pudeur qui m’a accompagnée tout au long de la lecture. C’est elle, précisément, qui m’a permis de tenir la distance sur ce chemin de l’abomination.

J’ai aussi retenu que jamais, comme ce long baiser si longtemps retardé, il ne fallait remettre à plus tard les plaisirs prêts à s’accorder dans l’instant. Nous ne savons pas de quoi est faite la seconde qui suit celle-ci.

Rarement un livre ne m’a autant ébranlée. Celui-ci m’a pas laissée indemne. Il appartient à ce monde précieux de ceux qu’on oublie jamais. Quand l’intime et l’universel ne font plus qu’un.

Je vous garantis, chers Amis, une perturbante lecture, mais si nécessaire !

Terrasses, Grand format