

Bonjour les Amis,
Une toute petite salle de théâtre. Classique. Je connaissais les lieux. La Maison de la Poésie. J’y suis entrée seule au milieu des autres, me suis approchée des planches, vers le bas. Je me suis assise au deuxième rang, à l’exact centre de l’allée, à équi-distance entre les deux micros posés sur scène, j’étais prête. Prête à les écouter. Installée dans mon siège de velours rouge, entre deux inconnues.
Mes yeux ont d’abord tout observé autour de moi. Du drapé de l’épais rideau noir en fond scène -qui n’était pas sans me rappeler des nuances obscures de Pierre Soulages -, aux rais de lumière blanche échoués sur la scène et dans lesquels virevoeltait une fine poussière, suspendue dans l’air. Au-dessus de moi, une image virtuelle et ondoyante.Trois hommes à demi-nus flottaient au plafond dans une danse presque réelle. Derrière moi, je sentais la salle se remplir, je percevais un brouhaha, le déplacement des corps, le froissement des étoffes, celles des manteaux qu’on ôtait et pliait sur les genoux. Puis les lumières se sont éteintes et doucement les voix du public ont fondu. Seule la vision du comédien et de l’écrivaine arrivant sur scène a alors monopolisé toute l’attention. Des applaudissements ont déchiré le silence, des sourires humbles se sont posés sur les visages du duo vedette d’un soir, et Giuseppe Verdi s’est manifesté.
Mon ventre s’est noué. Ma gorge a enflé.
C’est Alexia Stresi qui la première a entamé la lecture de son dernier livre : Des lendemains qui chantent (Flammarion). Une lecture en alternance avec le comédien Guillaume de Tonquédec, et l’ensemble entrecoupé de huit passages musicaux. Extraits de l’opéra Rigoletto de Verdi. Thème du livre joliment présenté.
L’histoire romanesque et passionnante d’Elio Leone, né à l’aube de la première guerre mondiale, orphelin au destin incroyable, ténor révélé lors de la première mise en scène de Rigoletto de Verdi à l’Opéra-Comique de Paris. Une plume foisonnante, extrêment vivante et vibrante pour raconter l’arrivée dans une existence chaotique puis riche de rencontres. Bercée par les chants lyriques et les airs d’opéra, je l’ai été de la première à la dernière ligne.
Ce magnifique livre interpelle, éveille. En particulier sur l’importance à donner à certains êtres croisés dans une vie. Ces rencontres qui peuvent en changer le tracé, celles qui peuvent faire basculer à droite ou à gauche du chemin prédessiné. Prédestiné.
Rien n’est jamais figé, à qui sait déceler et saisir les belles opportunités qui se présentent parfois. Un roman également sur l’amour, l’amitié, l’abandon, mais surtout sur la musique. Elle m’a portée tant en tournant les pages qu’en me laissant conter le texte.
Ce soir-là devant moi, deux voix, deux styles, deux timbres. Mais autant de hauteurs de ton chez l’une que chez l’autre pour révéler la puissance de tous les sentiments décrits.
Alexia Stresi, pour qui l’exercice était une première, a dévoilé sa sensibilité, voire une forme touchante de vulnérabilité. L’émotion l’a gagnée à plusieurs reprises. En particulier lors des intermèdes musicaux. Son visage s’illuminait dès les premières notes. Ses yeux brillaient d’un nouvel éclat et elle vivait réellement ces musiques qu’elle connaît à la perfection. Elle en fredonnait les paroles dans un murmure. J’ai deviné une exaltation vivement contenue.
Quant à Guillaume de Tonquédec, il possède un grand talent d’orateur aux multiples inflexions vocales. Toutes les nuances du texte ont été brillamment exprimées. J’étais au théâtre… emportée par le récit. J’étais à l’opéra en 1935…J’ai rencontré Elio, ce fabuleux ténor. J’étais émue d’y être tout autant que d’être là, face à cette scène. Face à ces deux artistes.
Alexia, Guillaume, je vous ai observés, l’un et l’autre, cherchant de temps à autre, mutuellement vos regards. Vos yeux se sont rencontrés seulement deux fois. C’était intense. C’était beau.
Une délicate complicité scénique pour mettre ce roman en lumière. Lui donner vie.
Je vous souhaite une très envoûtante lecture chers Amis.
Bravo ! ça donne envie
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